MISTRAL, Jacques (dir.) 2015. Le climat va-t-il changer le capitalisme ? La grande mutation du XXIè siècle, Editions Eyrolles, Paris, 269 p.
Bertin G. KADET
Enseignant Chercheur
Ecole Normale Supérieure d’Abidjan, Côte d’Ivoire
bertinkadet@yahoo.fr
Ce livre est un plaidoyer pour une gouvernance mondiale, dans la lutte contre le réchauffement climatique. Son auteur, Jacques Mistral a rassemblé les contributions de spécialistes pluridisciplinaires (économistes, financiers, historiens, politiciens, ingénieurs) sous le titre en objet. Les autres auteurs sont : Patrick Artus, Françoise Benhamou, Jean-Paul Betbèze, Anton Brender, Jean-Michel Charpin, Jean-Marie Chevalier, Raphaël Contamin, Bruno Fulda, Patrice Geoffron, Pierre-Noël Giraud, Frédéric Gonand, Fabien Hassan, Pierre Jacquet, Pierre-André Jouvet, Geoffrey Parker, Christian de Perthuis, Michel Rocard, Katheline Schubert, Akiko Suwa-Eisenmann et Jean Tirole. Cet ouvrage de 269 pages, se présente en trois parties.
L’entreprise débute par une perspective historique situant le dérèglement climatique contemporain parmi les précédents de l’histoire de l’humanité. La Terre a connu une période de réchauffement, comportant des phases de variations climatiques. D’un optimum climatique au Xè- XIIIè siècle, l’humanité est passée au « petit âge glaciaire » ou PAG, du XIVè au milieu du XIXè siècle. Le climat peut faire d’une crise, une catastrophe : un grand froid ou une sécheresse sévère peut affecter la production agricole et exposer les populations à des périls (maladies, famines) ou à des fragilités (guerres). De même, un déficit de production agricole peut entraîner une hausse de prix des denrées alimentaires, avec des conséquences possibles en termes de révoltes urbaines, comme cela s’est déjà produit au cours du XVII è siècle, en Europe, mais aussi dans la Chine des années 1644.
Ce qui importe lorsque ces situations se produisent, ce sont les réactions des sociétés pour y faire face. Or, l’histoire montre que face aux phénomènes climatiques, les hommes ont réagi différemment. En Europe, la révolution scientifique ayant suivi la crise du XVII è siècle a permis d’améliorer la productivité du sol, grâce à des procédés de fertilisation. La création d’organismes de recherche (Royal Society, Académie des sciences) en vue de prévenir les risques et les menaces naturels éventuels, attestent de cette démarche. En revanche, à la même époque, les pays asiatiques n’ont pas adopté des comportements préventifs face aux catastrophes naturels. Le climat permet de comprendre l’histoire, mais il n’en est pas la seule variable explicative. Le « printemps arabe » de 2011, qui s’est propagé à partir de la Tunisie, est une suite de révoltes populaires dues à de mauvaises récoltes dans le bassin méditerranéen frappé par la sécheresse. Les changements de régimes politiques ayant suivi les mouvements populaires, rappellent la révolution russe de 1917 due à la menace de la disette.
La science a donc besoin d’avoir des indices comparables entre hier et aujourd’hui, pour élaborer les stratégies de décision engageant le futur. L’histoire aide les décideurs à une meilleure prise de conscience de leurs responsabilités.
L’ÉCONOMIE DU CARBONE ET LE CAPITALISME
Cette première partie de l’ouvrage, portant sur le rôle de l’économie du carbone dans le développement du capitalisme, relève l’absence d’actions concrètes dans la lutte contre le réchauffement climatique. Pourtant, la solution est de parvenir à un accord global sur la réduction du gaz carbonique, et de fixer un prix de carbone unique et identique pour tous les pays et les industries, quels que soient les secteurs. L’application d’un tel dispositif sur le marché international, en plus d’obéir à des règles de transparence et d’incitation, doit s’exercer sur une durée suffisamment étalée, pour permettre une meilleure visibilité. Sur cette plate-forme, les arbitrages pourront se faire grâce aux instruments du marché international, avec le soutien des institutions internationales, notamment l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et le Fond Monétaire International. Cette approche nécessite une feuille de route.
LES NÉGOCIATIONS SUR LA QUESTION CLIMATIQUE
L’histoire des négociations sur le climat montre que, le succès du protocole de Montréal (1987) ayant conduit à l’interdiction des émissions de gaz CFC (chlorofluorocarbures), reposait sur trois piliers, à savoir un engagement politique fort, un système rigoureux et indépendant de suivi, et des instruments économiques adaptés. Le succès de la COP 21 à Paris dépendra de sa capacité à réunir ces trois piliers.
Depuis 1990, grâce aux rapports scientifiques sur les changements climatiques, la question du climat est au centre des préoccupations de la communauté internationale. La Convention-cadre de Rio (1992) et les accords subséquents (Copenhague 2009, Cancun 2010) ont pris des mesures en vue d’une limitation du niveau moyen du réchauffement climatique à 2°C. Cependant, l’interprétation binaire du principe de « responsabilité commune mais différenciée », distinguant les pays riches et le reste du monde, ne facilite pas les négociations devant parvenir à un accord. En plus, la gestion de la question climatique repose sur des organes techniques et un processus de négociation continue qui accentuent les difficultés.
Suite à la Convention-cadre de Rio (1992), le protocole de Kyoto (1997) a figé l’interprétation binaire du principe de différenciation de la responsabilité, en proposant une réduction de 5% des émissions de gaz pour les pays développés, et en permettant à ces pays d’échanger des droits d’émission sur le marché international. Il introduit le « Mécanisme de Développement Propre » (MDP) qui, en valorisant les réductions d’émissions des pays du Sud, amène ces derniers à intégrer le dispositif de lutte contre les changements climatiques. La conférence de Copenhague (2009) propose une autre forme d’incitations (self-service), en termes de transferts financiers des pays du Nord vers les pays du Sud. Faute d’instruments économiques forts, les négociations piétinent depuis cette date.
Le schéma, en vue d’un accord idéal sur le climat, consiste à fixer un prix unique de carbone à chaque tonne de Gaz à Effet de Serre (GES), pour tous les pays sans distinction. Dans un contexte guidé par le principe de différenciation de la responsabilité, le dispositif d’un prix uniforme de carbone ne peut être incitatif que si, dans son fonctionnement, il associe un principe de « bonus-malus » de carbone. Très clairement, étant donné un niveau moyen d’émissions de gaz par tête d’habitant, un pays dépassant ce niveau moyen est tenu de verser une contribution pour chaque tonne émise au-dessus du seuil. S’il diminue son niveau d’émissions, il allège son malus. Inversement, tout pays émettant en dessous de ce niveau de référence, reçoit une compensation, sur le nombre de tonnes économisées par rapport à la moyenne mondiale. Il accroît son bonus en économisant davantage de carbone. La mise en œuvre de ce schéma nécessite l’institution d’un marché international de carbone, et de la volonté politique.
La solution à la question du climat passe par une modification des comportements économiques des acteurs. Dans la pratique, les entreprises productrices d’électricité, dans l’Union Européenne, ont intégré les coûts d’externalités dans leur fonctionnement. Cela a eu pour conséquence, une réduction sensible des émissions de GES. En revanche, dans les autres entreprises de l’Union, cette prise en compte n’est pas évidente. Cela signifie que les entreprises ont des pratiques diverses face à la question du prix du carbone.
LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ET LA TRANSITION ÉCONOMIQUE
L’expression transition énergétique renvoie à la transformation progressive des systèmes énergétiques historiques vers des systèmes plus efficaces et moins intenses en carbone. En Europe, les directives de l’Union européenne ont procédé à une réorganisation de secteur de l’énergie. Les activités de production, de fourniture et de service d’énergie sont mises en concurrence, alors que celles liées au transport d’énergie (fils et tuyaux) sont organisées en monopole. C’est donc la volonté politique qui fixe les objectifs à atteindre et non le marché.
Cependant, la transition énergétique de l’UE rencontre des difficultés liées à l’inégalité des situations énergétiques de chaque pays membre. En plus de l’inégale situation des pays, les rigidités structurelles et comportementales en matière de production et de consommation d’énergie sont autant d’obstacles sur le chemin de la transition énergétique. Des facteurs d’accélération résident toutefois au sein des institutions de l’UE, dans les collectivités locales ainsi que dans l’organisation de l’économie locale.
La transition énergétique en Europe comporte plusieurs dimensions alimentées par les innovations. Parmi celles-ci, l’on note la décentralisation ayant réduit le pouvoir des gouvernants et des Etats, et accru celui des collectivités locales. De nouveaux acteurs économiques apparaissent sur le marché. Cette dynamique est impulsée grâce aux nouvelles technologies de l’information et de la communication, dans un contexte de mondialisation. En outre, la transition énergétique implique de nouveaux modes de gouvernance et de régulation. Dorénavant, la croissance économique s’opère avec moins d’intenses en carbone, dans un souci de préservation de l’environnement. C’est le concept de la croissance verte, faisant appel à une économie circulaire où la notion de recyclage occupe une place centrale. La question du climat est donc un défi pour la transformation des systèmes énergétiques et des systèmes économiques.
LA QUESTION CLIMATIQUE ET LA LOGIQUE DES CHOIX POLITIQUES
La seconde partie met en rapport la question climatique et les politiques publiques. D’après l’IPCC (Intergovernmental Panel on Climate Change), pour limiter l’augmentation de la température moyenne à 2°C en 2100, les émissions de GES ne doivent pas dépasser 1000 milliards de tonnes de gaz carbonique, et ce, à partir de 2012. La réussite de la croissance verte dépendra de la réduction des inégalités d’accès au capital naturel. Il faut donc réduire les inégalités actuelles de consommation entre les pays et à l’intérieur des pays, et compléter ces par un soutien à la recherche-développement pour accélérer les innovations.
La littérature scientifique (GIEC) démontre que le dérèglement climatique aura peu d’influence sur les grands équilibres économiques dans les prochaines décennies. Pourtant, la différenciation géographique des effets du réchauffement climatique, et le risque de multiplication des évènements catastrophiques affectant les pays, sont bien les caractéristiques du dérèglement climatique. Aussi, le réchauffement climatique est responsable des pertes de croissance économique des pays d’Asie du Sud et du Sud-Est, des zones densément peuplées et pauvres en partie, très touchés par les pertes économiques. La faiblesse des politiques publiques en matière de lutte contre le réchauffement climatique dans ces pays, trouve son explication dans ces situations, qui nécessitent une réponse environnementale adaptée. Il convient malgré tout de prendre des dispositions d’auto-assurance contre les risques climatiques extrêmes.
Les ressources financières destinées à freiner le changement climatique existent mais, leur mobilisation est confrontée à des difficultés. Depuis la fin des années 1990, les innovations technologiques et le changement de la stratégie de développement de certains pays émergents, notamment en Asie, ont favorisé une surabondance d’épargne. Cependant, les instruments économiques internationaux n’ont pas été en mesure de transférer le « trop-plein » d’épargne au profit de l’économie mondiale. L’enjeu est de trouver des canaux de financement, afin de mettre cette épargne au service de la lutte contre le réchauffement climatique.
Dans la lutte contre le réchauffement climatique, la question financière est abordée sous l’angle de transferts financiers des pays du Nord vers les pays du Sud. C’est une approche peu incitatrice car, la question du climat est davantage une problématique de transformation de l’économie mondiale. La lutte contre le réchauffement climatique nécessite une action collective, exige de la volonté politique, et implique un élargissement des perspectives. Sous ce rapport, la finance joue un rôle déterminant. Les stratégies financières commencent à intégrer la problématique du climat. L’apparition d’un nouveau type de comportement citoyen sensibilisé à la question climatique, la recherche du profit, et la prise en compte du climat dans la gestion des risques (risque climatique, risque carbone) expliquent cette évolution.
La lutte contre le réchauffement climatique exige aussi des alliés. Il ne faut pas abandonner la question du réchauffement climatique aux chercheurs et au politique ; il faut faire intervenir les acteurs d’entreprises. Les entreprises peuvent proposer des choix de consommation à leurs clients. Elles peuvent aussi produire des codes et des chartes de bonne conduite, qui permettront d’évaluer les comportements de leurs clients et de leurs fournisseurs, par rapport à la production du GES. En clair, le développement de logiques vertueuses conduiront à des changements de comportement face à la menace du réchauffement climatique.
LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ET LA GÉOPOLITIQUE
La troisième partie examine la question climatique dans le cadre de la géopolitique mondiale. Les pays pauvres subissent les effets du réchauffement climatique plus que les pays riches. Le GIEC (2014) situe le niveau de réchauffement climatique entre 2,6 et 4,8°C à l’horizon 2100. Cependant, avant cette échéance, l’Afrique Occidentale pourrait connaître une augmentation de la température de 3 à 6° C dès 2040, en particulier dans sa partie sahélienne. La canicule sera à l’origine de maladies pouvant affecter la santé publique. Ensuite, la montée du niveau de la mer (26 à 98 cm) en 2100, sera à l’origine d’une acidification des eaux par CO2, entraînant une perturbation des écosystèmes dont les plus exposés sont situés dans les pays en développement (îles du Pacifique, delta du Nil, Bangladesh). La diminution du rendement des sols due à l’augmentation de la température et à la baisse des réserves aquifères, participent de la faible productivité agricole dans ces pays. Devant la baisse de leurs productions, les agriculteurs adaptent leurs comportements, soit en modifiant les conditions des cultures, soit en migrant vers d’autres régions, pour échapper à la misère rurale. La lutte contre le réchauffement climatique est une lutte contre la vulnérabilité sociale.
La révolution du gaz de schiste aux Etats-Unis, due à la technologie du « fracking », pourrait encourager ce pays à retarder les mesures en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique. Le pays consacre moins de 1% de son budget à la lutte contre le réchauffement climatique, contre 17% à la défense. Pourtant, il est le deuxième plus gros émetteur mondial de GES devant la Chine. La politique environnementale du pays date de la seconde moitié du XIX avec la création d’espaces protégés (1872, parc national de Yellowstone). Cette politique s’est poursuivie tout au long du XXè siècle et au début du XXIè siècle, grâce aux mesures gouvernementales en faveur de la préservation de l’environnement (loi de 1916 ; Clean Air Act 1963; Environmental Protection Agency 1970 ; Clean Air Act 1990, Clean Power Incentive Fund 2015). Toutefois, la volonté politique manifestée par le gouvernement fédéral rencontre souvent l’opposition du Congrès Américain et de certains lobbies industriels. Devant cette situation, le gouvernement fédéral s’appuie sur des acteurs étatiques et privés pour développer des programmes de lutte contre le réchauffement climatique. Cette dynamique implique les collectivités locales, les entreprises et la société civile. Les Etats-Unis ont une grande responsabilité dans la question climatique. Leur engagement à la COP 21 incitera les pays émergents à se déterminer en faveur d’une politique commune sur le changement climatique.
Concernant la Chine, son modèle économique, traditionnellement grand consommateur d’énergie et grand pollueur atmosphérique, connaît une évolution moins négative, en raison d’un détournement économique vers les services. Entre 1990 et 2009, le pays a développé des industries de transformation nécessitant une main d’œuvre abondante et bon marché. Sa production a pour principal débouché l’exportation et une forte demande intérieure. Ce modèle économique est gros consommateur d’énergie et de matières premières, notamment le pétrole, le gaz naturel et le charbon. Ce modèle connaît une évolution depuis 2010, due à la volonté étatique d’augmenter les salaires, pour accroître le rôle de la consommation dans l’économie. Dorénavant, il revient cher de produire en Chine, et cette situation conduit à la stagnation et la délocalisation industrielles. En outre, la politique de consommation oriente l’économie vers les services et permet de réduire les émissions polluantes. Ces nouvelles orientations renforcent la politique du pays, en matière de réduction de la pollution et de protection de l’environnement, amorcée dès la fin années 1980. Aujourd’hui, la consommation d’énergie de la Chine est réduite (40 % en vingt ans de la consommation par unité de PIB). En outre, le pays connaît une évolution technologique qui, depuis 2013, consacre une part de plus en plus croissante aux énergies renouvelables (hydroélectrique, solaire, éolien, biomasse, géothermie). En 2013, 75% des investissements dans l’électricité concernent les énergies non fossiles, et le marché du CO2 sera unifié dans tout le pays en 2016. La Chine est très engagée dans les négociations visant le développement des énergies renouvelables et la réduction du GES.
En Europe, les menaces de changement climatique constituent une priorité de la politique de l’Union. Cependant, la volonté européenne se manifeste dans un environnement mondial marqué par la crise économique, la révolution des hydrocarbures de schistes affectant la compétitivité de l’Europe. Dans ce contexte géopolitique, la COP 21 représente, pour elle, une étape cruciale dans la coordination de sa politique de transition énergétique. Les pays membres font face à une crise énergétique, aggravée par la montée du chômage, le ralentissement de l’activité économique et les perturbations des prix de l’électricité sur les marchés. A cela s’ajoute l’inefficacité des mécanismes de coordination des décisions autorisant des choix nationaux. Face à la montée du baril de pétrole, les pays membres cherchent à exploiter de nouvelles énergies fossiles dans les profondeurs marines ou souterraines, un domaine où les Etats-Unis sont pionniers et qui confère à ce pays, un avantage en matière de transition énergétique. Dans un contexte de globalisation économique, cette perspective est inquiétante pour l’Union Européenne dont les exportations pourraient pâtir des variations des coûts énergétiques. En l’absence d’une politique coordonnée, cette situation préfigure pour l’Union Européenne, des difficultés face à ses alliés économiques traditionnels, et face aux pays émergents.
REGARD SUR L’ARCTIQUE
L’ouvrage s’achève par un regard solidaire porté à la situation de l’Arctique, une région de la planète jusque-là inexploitée. Le réchauffement climatique a des conséquences en Arctique notamment sur le gaz méthane et sur l’albédo. Le réchauffement climatique se manifeste sur les trois grandes sources froides de la planète, à savoir l’Arctique, l’Antarctique et les glaciers de l’Himalaya. Dans ces régions froides, les glaciers font sur des volumes énormes. Le pergélisol subit un dégel, et toutes les eaux libérées se déversent dans les fleuves et les océans, ce qui est l’origine de la montée du niveau des eaux. Le dégel des terres et des eaux libère des quantités de méthane, un nouveau type de GES profondément enfouie dans le sol, dont la capacité de blocage des ondes et de chaleur est nettement supérieure à celle du CO2. Il en résulte une modification des habitudes de vie des animaux et des populations de cette région.
D’après la science (GIEC), l’augmentation de la température de la terre, de l’ordre de 0,6°C entre le début et la fin du XXè siècle, dépasse 2°C dans la zone Arctique, où il est de 1°C par décennie durant cette période. Cette dynamique est à l’origine de la réduction de la banquise polaire à plus de 10 millions de kilomètres carrés aujourd’hui. Ce réchauffement a des conséquences sur le niveau moyen de l’albédo, c’est-à-dire, le phénomène d’absorption et de renvoie de la chaleur par la glace et l’eau. La glace ayant un effet d’albédo plus fort que l’eau, sa fonte due au réchauffement, entraîne une réduction de l’albédo moyen de toute la région Arctique. D’où l’urgence de la lutte contre le réchauffement climatique. Enfin, l’exploitation des ressources énergétiques et marines de la zone Arctique n’est encadrée par aucune réglementation commune internationale, chaque pays riverain y allant selon ses propres règles. La déclaration d’Ottawa (1996), suivie du Conseil de l’Arctique (2000), constituent les ébauches d’une stratégie commune internationale, dans la réglementation des activités humaine dans la zone de l’Arctique. Cet effort mérité d’être poursuivi pour faire de l’Arctique une zone où les activités économiques respectent les règles environnementales.
Finalement, en ouvrant le livre sur un rappel historique, et en le refermant sur une perspective d’avenir, l’Arctique incarnant cet avenir environnemental, Jacques Mistral fait preuve d’une grande ingéniosité pédagogique et didactique en matière de communication. Cet effort de communication témoigne de l’importance de la question climatique et l’enjeu de la lutte contre le réchauffement climatique pour tous les pays du monde. A la veille de la Conférence de Paris sur le climat, la COP 21 qui s’ouvre à la fin du mois de novembre 2015, cet excellent plaidoyer mérite d’être relayé auprès de tous les citoyens du monde, en particulier les décideurs, pour l’avènement d’un monde décarbonisé.
Jacques Mistral est Français, polytechnicien et agrégé de sciences économiques. Il est conseiller spécial à l’Institut français des relations internationales, senior fellow de la Brookings Institution (Washington) et membre du Cercle des économistes. Il a enseigné à l’université de Harvard, à celle du Michigan et de Nankin. Il a été conseillé économique du Premier ministre Michel Rocard et de Laurent Fabius ministre des Finances. Il est crédité de plusieurs publications scientifiques.