The Regional Guide to the Blue Economy as a guide to the economic renaissance of Africa’s coastal states: what sustainable development perspective for Madagascar?
L. Ylenia RANDRIANARISOA
Résumé: L’économie bleue n’a pas de définition universelle, mais son sens est compréhensible et réalisable. Il est maintenant temps d’aller plus loin pour renforcer les options de développement, en particulier pour les petits États insulaires en développement et les moins avancés, tel que Madagascar. L’économie bleue est très spécifique par son caractère inclusif : croissance économique, durabilité de l’environnement et amélioration de nos moyens de subsistance. Cela contribuera aussi inévitablement à la réduction de la pauvreté et des inégalités dans la répartition des ressources, et constitue l’élément essentiel de la relance économique ainsi que le catalyseur d’une transformation socioéconomique durable du pays. Du concept à la mise en œuvre, avec le guide régional de l’économie bleue, Madagascar a déjà des pré-acquises. En effet, Madagascar progresse tout en comprenant le défi de la promotion de l’économie bleue qui repose sur une stratégie à long terme de la reconstruction de son économie.
Mots clés: Développement durable, États côtiers africains, économie bleue, Guide régional, Madagascar
Abstract: The blue economy has no universal definition, but its meaning is understandable and achievable. It is now time to go further to strengthen development options, especially for Small Island developing states and least developed countries, such as Madagascar. The blue economy is very specific in its inclusiveness: economic growth, environmental sustainability and improving our livelihoods. It will also inevitably contribute to the reduction of poverty and inequalities in the distribution of resources, and is the essential element of economic recovery as well as the catalyst for a sustainable socio-economic transformation of the country. From concept to implementation, with the regional guide to the blue economy, Madagascar already has some pre-acquired skills. Indeed, Madagascar is making progress while understanding the challenge of promoting the blue economy, which is based on a long-term strategy for rebuilding its economy.
Keywords: Sustainable development, African coastal States, blue economy, Regional guide, Madagascar
Plan
Introduction
Contexte du développement durable de l’économie bleue
Le guide régional de l’économie bleue
Principes généraux de l’économie bleue
Champ d’application de l’économie bleue
Approche d’analyse sur la durabilité, l’écosystème et les institutions
Modèle rationnel d’économie bleue pour Madagascar
Approches spatiales de la mise en œuvre de l’économie bleue
Approche géographique et milieu
Mesures d’accompagnement de la mise en œuvre de l’économie bleue
Conclusion
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INTRODUCTION
Situé entre l’Afrique, l’Océan austral, l’Asie et l’Australie, l’Océan Indien est le troisième espace maritime de la planète. Après le pacifique, il compte le plus grand nombre d’espèces commerciales et de pêcheurs à plein temps, artisans et petits pêcheurs (Mathew S., 2001). Le poisson y fait partie des traditions culinaires et la pêche constitue la source d’emplois, de revenus et de devises pour la population et les pays côtiers. La production de l’Océan Indien est importante, tant pour la consommation locale que pour les marchés extérieurs. Le thon et autres thonidés constituent la majeure partie de la production. Selon la FAO (2002), un quart de la production mondiale de thon provient de l’Océan Indien et des eaux adjacentes. Les ressources thonières de l’Océan Indien sont les deuxièmes plus importantes au monde et contribuent considérablement à la sécurité alimentaire dans l’ensemble de la région. La capture annuelle de thon dans la zone de l’Océan Indien a été estimée à 1 200 000 tonnes (CTOI, 2013).
Dans le but de prôner le développement durable, les Nations Unies ont promulgué la convention sur le droit de la mer en 1982 dite Convention de Montego Bay. Elles ont mis en œuvre en 1992 la conférence de Rio relative à l’environnement et le développement. Par la suite, un document portant agenda 21 a été élaboré en vertu de la conférence de Rio sur l’environnement et le développement durable. Il est indispensable d’œuvrer dès à présent et dans les décennies à venir, pour conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines afin qu’ils retrouvent leur vocation première, celle de contribuer au progrès social et au développement durable.
Au moment où les économies africaines présentent des signes d’essoufflement, l’Économie Bleue se présente comme une opportunité permettant de leur redonner un nouveau souffle, notamment pour les pays insulaires et côtiers, où s’ouvrent désormais de réelles opportunités de transformation des économies nationales. Selon la Banque Africaine de Développement (2017), l’accompagnement des pays dans cette nouvelle dynamique, conforme à sa Stratégie Décennale (2013-2022) et ses cinq priorités (Top 5) que sont : (i) Éclairer l’Afrique et l’alimenter en énergie, (ii) Nourrir l’Afrique, (iii) Industrialiser l’Afrique, (iv) Intégrer l’Afrique et (v) Améliorer la qualité de vie des populations en Afrique.
Non seulement, l’Afrique doit lutter contre la pauvreté, qui touchent plusieurs centaines de millions de personnes, mais également elle doit résorber les importations de produits alimentaires estimées à 35 milliards de dollars US (110 milliards en 2025 si rien n’est fait par an). L’Afrique doit créer davantage de richesses et d’emplois et se hisser en haut des chaines de valeurs agricoles mondiales, notamment en ce qui concerne certains produits de la mer.
CONTEXTE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE DE L’ÉCONOMIE BLEUE
Au niveau mondial, les réponses apportées par l’Économie Bleue à la problématique du développement durable est désormais reconnue. Dans cette optique, tous démontrent l’adéquation du concept de l’Économie Bleue pour catalyser le développement socioéconomique durable des pays initiateurs à travers une diversification de leur économie. Toutefois, au-delà de ces acceptions communes, les États doivent avoir la ferme conviction que ce concept n’est pas figé et qu’il n’existe pas de modèle unique de Croissance Bleue. Ainsi, le succès avéré d’un modèle de croissance bleue adopté dans un pays ne génère pas nécessairement les mêmes résultats dans un autre dans la mesure où ce concept est fortement rattaché aux réalités sociétales, géographiques et culturelles spécifiques à chaque pays. Dans ce cadre, c’est une approche qui implique la mise en œuvre de mesures d’adaptation au niveau local basées sur ses caractéristiques géographiques, ainsi que son contexte économique, politique, social et juridique. Il s’ensuit qu’une multitude de facteurs entrent en jeu afin qu’un État côtier puisse définir ce qu’est pour elle l’Économie Bleue.
L’Économie Bleue se définit comme un concept de reconfiguration de l’économie maritime. Plus précisément, si auparavant les activités maritimes contribuaient à l’économie maritime, cette économie maritime est aujourd’hui reconfigurée pour devenir une Économie Bleue. Cette approche de l’Économie Bleue prône d’une part le concept de durabilité à travers l’usage durable des ressources marines. D’autre part, cette approche implique les notions de conciliation de la préservation de l’environnement et de l’exploitation optimale des ressources à travers la gestion conservatrice des écosystèmes aquatiques et marins et des ressources qui leurs sont associées.
Si telle est l’appréciation en ce qui concerne la définition de l’Économie Bleue, la croissance bleue représente ainsi le résultat attendu issu de l’Économie Bleue.
Le guide régional de l’économie bleue
À l’issue de la 19ème session de la réunion organisée par le comité intergouvernemental des experts du Bureau sous régional de l’Afrique de l’Est de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CAE) qui s’est tenue à Antananarivo (capital de Madagascar) du 2 au 5 mars 2015, un Guide Régional de l’Économie Bleue intitulé « L’économie bleue en Afrique : Guide pratique » a été élaboré. Ce guide est satisfaisant et reconnait ses multiples avantages dans la mesure où il fournit les lignes directrices précises et claires permettant au pays de consolider sa transition vers la croissance et l’Économie Bleue. Par ailleurs, le cadrage qu’il propose permet de disposer des outils nécessaires à l’exploitation des potentialités de l’Économie Bleue à Madagascar (CEA, 2016).
Toutefois, ce guide a été élaboré à l’échelle régionale. À ce titre, il apparaît indispensable de l’affiner et de l’approfondir afin de parvenir à l’élaboration d’un guide national. En effet, comme il l’a été souligné précédemment, l’Économie Bleue doit être adaptée au contexte national. De ce fait, pour Madagascar, la réalisation de ce document constitue une étape cruciale qui lui permettra de dresser les fondements de sa transition vers l’Économie Bleue. Aussi, pour un pays en voie de développement tel que Madagascar, l’élaboration de ce guide à l’échelle nationale contribuera à l’harmonisation des activités entreprises par les investisseurs et les partenaires en évitant les réajustements répétitifs causés par l’absence d’un cadrage clair et précis.
En conséquence, il importe pour Madagascar d’élaborer dans une première étape, un guide national de l’Économie Bleue, et de définir un cadrage adapté à son contexte et à ses objectifs avant d’entamer les détails de son processus de transition vers l’Économie Bleue.
De par sa situation géographique et en étant une grande ile, Madagascar a une grande potentialité, un grand avantage, mais il faut examiner et travailler sur cette réalité, car il y a beaucoup plus de choses à considérer notamment cette territorialité et les potentialités bioécologiques. Il faut au préalable identifier les meilleures modalités opérationnelles. Certes la consistance de l’apport que Madagascar peut recevoir de cette assistance, et par rapport à cette dimension de territoire maritime, on ne puisse pas traiter tout le territoire en même temps. Le mieux, c’est d’adopter l’approche d’inclure dans les stratégies nationales le concept de l’Économie Bleue (Colgan, 2018). Il faut alors identifier des priorités et que ses priorités soient traitées dans le premier programme d’assistance. Ces priorités doivent se repartir selon la politique déjà adoptée par l’État et répondre à la fois au besoin des diverses localités que l’Économie Bleue peut être mise en œuvre.
Principes généraux de l’économie bleue
La formulation de la politique de l’Économie Bleue devra prendre en considération les principes généraux suivants avant sa mise en œuvre : le premier principe fait référence à la considération de l’aspect régional, qui est clairement inscrit dans le guide (1). Le second principe quant à lui, concerne la nécessité de prendre en compte la paix régionale. En effet, c’est la gestion efficiente et efficace des ressources marines qui conditionne cette paix régionale (2).
À ce titre, il importe de souligner que beaucoup de facteurs conditionnent l’instauration de cette paix régionale. D’une part, elle implique une stabilisation de la zone maritime qui exige à son tour, la mise en œuvre de démarches telles que l’adoption de mesures relatives à la sécurité maritime et la lutte contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN). Elle implique également une application effective de la lutte contre la piraterie maritime.
D’autre part, cette paix régionale requiert la délimitation des frontières maritimes. En effet, la sécurisation de la zone maritime passe par la délimitation de l’espace maritime. C’est sur ce point que Madagascar appuie sur la nécessité de procéder à cette délimitation. Une telle démarche ne signifie pas le « partage » de la région pour Madagascar, mais vise au contraire à renforcer et à consolider sa souveraineté en ce qui concerne la maitrise de son espace maritime et la sécurisation des ressources qui s’y trouvent. C’est dans ce contexte que Madagascar manifeste sa volonté politique réelle et son engagement à avancer vers le processus de transition vers l’Économie Bleue. Pour ce faire, le pays procèdera à l’élaboration d’un guide national qui lui permettra de définir tous les cadrages, les axes stratégiques ainsi que l’approche adoptée pour la mise en œuvre de l’Économie Bleue sur le plan national.
CHAMP D’APPLICATION DE L’ÉCONOMIE BLEUE
Dans cette optique de répondre aux principes de l’Économie Bleue en particulier au niveau régional, afin d’appuyer la mise en œuvre de ce processus, les champs d’application de l’économie bleue s’adressent à l’alignement du concept de l’Économie Bleue dans la Politique Générale de l’État (PGE) et son Plan de Mise en Œuvre (PMO) et ; un cadrage trépied. Il se repose sur : Le cadrage juridique par rapport à la législation régionale, nationale et internationale (i), le cadrage institutionnel (ii) ainsi que le cadrage politique (iii). Il convient de souligner que cet alignement national a pour ambition d’aboutir à l’alignement régional et international.
Approche d’analyse sur la durabilité, l’écosystème et les institutions
L’étude a été réalisée à partir des prospections bibliographiques, des entrevues et des enquêtes auprès des acteurs concernés par la mise en œuvre de l’économie bleue dans la région Afrique et à Madagascar. Elle se déroulait de septembre 2016 à décembre 2017.
L’analyse de durabilité (Villeneuve, 2017) a permis de voir les différents progrès réalisés en dimension régionale de la gestion des territoires maritimes et les ressources marines. Ces progrès ont été ensuite analysés dans le cadre de la gestion durable des ressources marines et côtières. Par la suite, les enjeux seraient déterminés tel le mode de gestion, variables clés de la durabilité de l’exploitation des ressources.
D’emblée, l’approche est progressive et collaborative par une transdisciplinarité avancée entre les scientifiques (écologistes, biologistes, sociologues, économistes, géographes…). Elle consiste à déterminer l’importance de la dimension géopolitique, développement social, juridique et institutionnel dans une approche régionale et/ou étatique de l’économie bleue.
Modèle rationnel d’économie bleue pour Madagascar
Dans notre approche à la transition vers l’économie bleue, Madagascar a identifié des conditionnalités préalables dans sa mise en place. Ces principes généraux devront être considérés pour une effectivité de la transition : (1) la souveraineté absolue dans l’espace maritime par maitrise et délimitation des frontières ; (2) la coopération régionale et internationale gagnant-gagnant ; (3) la stabilité régionale : sur sécurité maritime, sur la lutte contre les trafics illicites des ressources marines et des activités illégales. Aujourd’hui, Madagascar a encore un long chemin à faire pour arriver à une économie bleue durable. Beaucoup d’étapes restent à passer. Une planification concertée sera nécessaire.
D’ailleurs, des perspectives et des priorités ont été identifiées pour l’effectivité à cette transition : (1) l’élaboration d’un modèle de gouvernance de l’océan adapté pour Madagascar ; (2) l’élaboration des plans de développement local a l’intégration de l’économie bleue ; (3) le développement des outils de mise en œuvre vers l’économie bleue en particulier la planification spatiale marine ; et (4) le renforcement institutionnel sur la mise en place de l’économie bleue par renforcement des coopérations et des partenariats.
Depuis quelques années, à travers la politique générale de l’État et son Plan de Mise en œuvre, Madagascar souhaite mettre en valeur ses atouts naturels en relevant des défis sur la préservation de l’environnement, sur la gestion des ressources stratégiques, sur la gouvernance, sur la défense nationale et l’intégrité de l’État. Des orientations stratégiques se sont alors développées pour réaliser ses défis à ne pas citer que la protection des côtes, des eaux territoriales, de la zone économique exclusive et bien évidemment des ressources, l’optimisation et la normalisation de la gestion et l’exploitation des ressources halieutiques, le renforcement de la gouvernance environnementale et la promotion de l’Économie bleue.
Avec l’adoption de l’agenda 2030 pour le développement durable, Madagascar a encore voulu aller plus loin et plus en profondeur dans son développement. Des priorités sur les objectifs et sur les cibles ont été définies nationalement avec un accent particulier sur l’objectif de développement durable numéro 14. Avec l’achèvement de l’objectif numéro 14, qui est en évidence transversal par rapport à ses impacts, Madagascar désire atteindre les autres objectifs du développement durable en intégrant le concept de l’Économie bleue, à ne citer que les objectifs : un et deux, sept à neuf, onze à treize, et 17. L’atteinte de la croissance bleue ne serait effective que par la considération et l’achèvement des objectifs de développement durable.
Dans cette transition vers l’Économie Bleue, le modèle à adopter par Madagascar serait un modèle qui exploite la nature géographique et écobiologique de zones côtières et marines de l’ile par le modèle du « 50 – 40 – 10 » (Randrianarisoa en 2017, par communication personnelle auprès du Conseil des Ministres, dirigé par le Président de la République Hery M. Rajaonarimampianina).
Il s’agit en premier lieu de la (1) gestion conservatoire de l’écosystème marin et de ses ressources au taux de 50% pour la totalité de la juridiction maritime de Madagascar. Cette première proportion concerne la gestion conservatoire de l’écosystème marin et de ses ressources ainsi que des actions qui leur sont associés. La gestion conservatoire est source de retombées économiques importantes pour le tourisme, et contribue également à la lutte contre le changement climatique pour Madagascar à travers des potentialités comme la vente de quotas de C02 qu’elle suscite par le carbone bleu.
En deuxième position, c’est la promotion des activités maritimes innovatrices et renforcement de l’économie maritime existante 40% pour la totalité de la juridiction maritime de Madagascar. Dans ce modèle, la seconde proportion évaluée aussi à 40% est consacrée à la commercialisation des efforts de régulation du climat. Celle-ci concerne notamment la création de nouveaux produits marins et naturels touchant de nouveaux secteurs innovants tels que le secteur médical et le domaine du cosmétique. Elle inclut également les recherches en biotechnologie marine et l’amélioration des transports maritimes par l’innovation des infrastructures portuaires ;
Enfin, arrivée le 10% destiné à exploitation extractive. Ce taux restant représente le pourcentage relatif à l’extraction en hydrocarbure et en ressources minières sous-marines. Il s’agit de l’activité la plus difficile et la plus délicate dans la mesure où c’est celle qui menace le plus l’écosystème. En dépit de ses enjeux environnementaux, cette activité reste néanmoins incontournable, surtout pour un pays en développement tel que Madagascar. Afin d’atteindre ces 10%, des efforts considérables devraient ainsi être fournis par Madagascar dans la mesure où son exploitation en termes de ressources non renouvelables ne dépasse pas encore actuellement les 5%. Madagascar a encore la chance de doubler les exploitations extractives.
APPROCHES SPATIALES DE LA MISE EN ŒUVRE DE L’ÉCONOMIE BLEUE
Tel qu’il l’a été évoqué précédemment, le processus de transition vers l’Économie Bleue implique un cadrage préalable et des principes de mise en œuvre. De même au niveau national, il importe également de définir le champ d’application de l’Économie Bleue en termes géographiques. Ce champ d’application concerne la mer, les océans, les zones côtières, et les zones allant jusqu’à 60 km à compter de la ligne de base vers la terre ferme. Il inclut ainsi les cours d’eau, les estuaires, les lacs côtiers, les nappes souterraines, les baies et les rivages.
Approche géographique et milieu
D’après la vision de Madagascar sur l’océan, le cadre stratégique de l’Économie Bleue s’applique de part et d’autre à partir des lignes de base : jusqu’à 60 kilomètres vers l’intérieur de la terre et atteignant environs les 200 miles de notre zone économique exclusive (ou dans les frontières des délimitations avec les autres États voisins) avec une considération de notre plateau continental.
Pour une meilleure approche géographique de notre stratégie, l’espace maritime de Madagascar sera divisé en cinq provinces selon les critères d’homogénéité de conditions océanographiques, les modalités de l’exploitation et les différents écosystèmes marins et côtiers caractérisant les zones à savoir (1) la province nord-est de la Région Atsinanana à Antsiranana, (2) la province sud-est de la Région Atsinanana jusqu’au Cap Sainte-Marie, (3) la province sud-ouest du Cap Sainte-Marie à la Région Atsimo-Andrefana, (4) la province moyen-ouest et (5) la province nord-ouest.
La Planification Spatiale Marine est une approche stratégique dans la mise en place de l’Économie Bleue à Madagascar. En tenant compte de la multiplicité des activités dans cet espace maritime qui accroit non seulement les pressions sur les écosystèmes marins et côtiers, mais aussi sur les différents conflits générés par ces activités, des stratégies sur la gestion d’espace contribueront au renforcement de la mise en place de l’Économie Bleue.
Le champ d’application de l’Économie Bleue est défini suivant une approche courante dudit concept. La considération des différents types de plans d’eau permet de définir les plans d’eaux comme partie intégrante de la zone d’intervention de la stratégie de mise en place de l’Économie Bleue. Les rivages, les fleuves, les lacs, les berges, les cours d’eau, les nappes phréatiques, les mers, les fonds marins et les océans seront intégrés dans l’approche.
La connaissance du milieu est une exigence dans la mise en œuvre de la stratégie de l’Économie Bleue à Madagascar. La valorisation de notre espace maritime et de ses ressources se base sur la détermination et l’identification de leur potentialité à fournir du service, à se restaurer et/ou à se renouveler de façon durable. Des études et des recherches disposent d’une place importante dans la conception de l’Économie Bleue non seulement pour appuyer le développement, mais aussi pour aller vers l’innovation. Des cadres d’orientation « recherche » seront adoptés pour pallier aux différentes lacunes dans la compréhension de ces milieux.
Mesures d’accompagnement de la mise en œuvre de l’économie bleue
En ce qui concerne les mesures d’accompagnement, l’approche de l’Économie Bleue nécessite qu’elle soit institutionnalisée (Lourau, 1970). Dans ce cadre, les institutions qui se chargeront de cette institutionnalisation de l’Économie Bleue à Madagascar seraient coordonnées par la présidence de la république ou la primature et accompagnées par le département en charge de la mer, le département en charge de l’Économie et du Plan, le département en charge de l’environnement ainsi que le département en charge de l’aménagement des territoires. En effet, la mise en œuvre de l’Économie Bleue implique la planification des activités et de l’espace. À ce titre, ces départements auront pour attribution la planification spatiale marine.
Ces institutions travailleront en étroite collaboration en vue de développer une synergie qui permettra de disposer des moyens adéquats au déploiement de l’Économie Bleue à Madagascar.
Au regard de ce qui précède, la planification est donc l’une des forces majeures qui permet à Madagascar de mettre en marche sa transition vers l’Économie Bleue. C’est pourquoi cette dernière ne devrait pas être dissociée de la planification spatiale.
CONCLUSION
Pour conclure, à travers les immenses potentialités qu’elle offre à un développement durable, Madagascar soutient sa ferme volonté d’asseoir la mise en œuvre du processus de transition vers l’Économie Bleue. Cette ambition implique toutefois de définir préalablement les approches et les bases nécessaires à sa mise en œuvre.
Pour notre part, nous souhaitons souligner deux points sur lesquels nous devons poursuivre la réflexion de manière à trouver des solutions durables : d’un, d’identifier les priorités, les enjeux, les contraintes, ainsi que les défis à relever, pour la mise en œuvre pratique de l’Accord 2009 relatif aux mesures du ressort de l’État du port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée ; et de deux, le développement des partenariats publics privés pour faciliter et financer la transition vers une économie bleue.
À ce titre, l’approche de l’Économie Bleue est porteuse d’espoir pour Madagascar si elle peut être concrétisée. En effet, à travers les retombées socioéconomiques qu’elle engendre, elle contribuera inéluctablement à la réduction de la souffrance des inégalités et de la répartition des ressources. Par ailleurs, en tant qu’élément de relance économique, l’Économie Bleue catalysera la transformation socioéconomique et apportera ainsi la stabilité sociopolitique durable pour le pays.
En outre, l’Économie Bleue est un élément de reconquête géopolitique et joue un rôle essentiel en tant qu’instrument d’adaptation dans le contexte de la mondialisation. En ce sens, pour un pays tel que Madagascar, elle permet de mettre fin à la décolonisation et de procéder à une transformation économique et structurelle majeure.
Mais au-delà de cet aspect national, il est important de souligner que la mise en œuvre de l’Économie Bleue est avant tout porteuse d’espoir pour la Région Afrique tout entière, dans la mesure où à travers les transformations socioéconomiques qu’elle engendre, elle donnera un nouveau souffle à la renaissance de la nouvelle Afrique. Dans cette perspective, nous avons la ferme conviction qu’un nouvel élan pour Madagascar s’annonce également à travers l’approche de l’Économie Bleue.
À cet égard, Madagascar est ainsi prêt à aller de l’avant pour intégrer cette Économie Bleue dans ses stratégies, sa politique et ses lois nationales, mais devra préalablement poser les bases nécessaires à sa mise en œuvre.
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Pour citer cet article
Référence électronique
L. Ylenia RANDRIANARISOA (2021). « Le Guide Régionale de l’Économie bleue comme un guide de renaissance économique des États côtiers de l’Afrique : quelle perspective de développement durable pour Madagascar ? ». Revue canadienne de géographie tropicale/Canadian journal of tropical geography [En ligne], Vol. (8) 1. En ligne le 15 août 2021, pp. 08-17. URL: http://laurentian.ca/cjtg
Auteure
L. Ylenia RANDRIANARISOA
Enseignante-Chercheure
Département de Droit, Économie et Gestion
Université de Toamasina – Madagascar
Chercheur visiteur, Ocean Networks Canada
Université de Victoria – Colombie-Britannique, Canada
Courriel : raylenia@yahoo.fr